En actant la création d’un Fonds public-privé exclusivement consacré à l’industrialisation du manganèse, le président Brice Clotaire Oligui Nguema bouscule les lignes et change la grammaire économique du pays. Fini le temps des exportations brutes et des dividendes fuyants. Place désormais à la transformation locale, aux chaînes de valeur maîtrisées et à la souveraineté industrielle assumée. Ce mécanisme inédit, dévoilé à l’issue du Conseil des ministres du 30 mai, est tout sauf une déclaration d’intention : c’est un bras de levier pensé pour attirer les capitaux privés, responsabiliser les opérateurs nationaux et stimuler l’émergence d’un écosystème minier intégré.
Derrière cette initiative, une vision : celle d’un Gabon qui se projette au-delà de ses mines comme simples gisements, et qui revendique sa capacité à produire, transformer, exporter des produits finis et créer des emplois décents sur son sol. Le choix du manganèse n’est pas fortuit. Ce minerai stratégique, utilisé notamment dans la fabrication de batteries et d’alliages métalliques, est au cœur des transitions technologiques mondiales. En capturant davantage de valeur ajoutée à domicile, Libreville entend jouer sa partition dans la nouvelle cartographie industrielle africaine — celle des nations qui ne veulent plus vendre leur sous-sol au poids, mais bâtir des filières durables, compétitives et structurantes.
À l’évidence, cette décision marque une rupture avec les dogmes anciens et les pratiques rentières. Elle impose un nouveau pacte entre l’État et les opérateurs économiques : plus d’accès aux ressources sans engagement industriel. En d’autres termes, le temps des permis dormants est révolu. Ce fonds, pensé comme catalyseur, vient repositionner le Gabon dans un espace où l’industrialisation n’est plus un mythe de conférence, mais une stratégie offensive, concrète et mesurable. L’Afrique que veut Oligui Nguema n’est pas celle qui subit, mais celle qui transforme. Et cette fois, c’est le manganèse qui ouvrira la voie.

