Commande publique : 93 % des marchés attribués sans appel d’offres, la Transition à l’épreuve de la transparence

Alors que le gouvernement prône une gouvernance exemplaire, le dernier Conseil des ministres révèle une pratique quasi-systématique de l’entente directe dans la passation des marchés publics.

Le chiffre a fait l’effet d’un électrochoc : 93,25 % des marchés publics, en valeur, ont été attribués par entente directe en 2025, selon les propres termes du gouvernement lors du Conseil des ministres du 30 mai. Ce constat, bien que formulé avec gravité, soulève une contradiction majeure : comment parler de bonne gouvernance quand la quasi-totalité des contrats échappe aux règles élémentaires de transparence et de concurrence ? Loin d’être un détail technique, cette dérive reflète un mode de gestion hérité, où l’opacité prévaut sur les procédures, et où le pouvoir administratif semble servir plus d’intérêts particuliers que l’intérêt général.

Le phénomène n’est pas nouveau, mais sa persistance sous un régime de transition censé restaurer l’éthique publique pose question. L’arrivée au pouvoir du CTRI avait pourtant suscité l’espoir d’un renouveau institutionnel. Pourtant, à l’image de certains chantiers confiés à des entreprises jusque-là inconnues, ou de figures économiques passées du silence à l’influence, la continuité dans l’opacité l’a emporté sur la rupture annoncée. Le cas d’Henri-Claude Oyima, jadis président de la FEG et aujourd’hui membre du gouvernement, cristallise ce paradoxe : prompt à dénoncer des pratiques qu’il n’a jamais contestées lorsqu’il était acteur économique, sa prise de parole tardive interroge sur la sincérité des élans réformateurs.

Au-delà du constat, la question centrale reste celle de la volonté politique. Car en matière de commande publique, les effets d’annonce ne suffisent plus. Il faut une réforme en profondeur des mécanismes d’attribution des marchés, un cadre rigide de reddition des comptes, un dispositif de sanction effectif et une réelle séparation entre sphère politique et intérêts économiques. Sans quoi, le discours sur la bonne gouvernance restera une façade. Le gouvernement, encore porté par une légitimité de transition, joue ici sa crédibilité : soit il choisit la transparence, soit il prolonge l’ère du clientélisme sous une nouvelle bannière.

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