Alors que le Gabon s’approche de l’échéance cruciale de l’élection présidentielle, une question brûlante se pose : que deviennent les anciens barons du système Bongo, ces figures qui ont marqué les dernières années du régime déchu ? Si certains ont disparu des radars, d’autres ont su, avec opportunisme, se repositionner dans la nouvelle configuration politique. Mais leur ralliement à la Transition et à une possible candidature du général Oligui Nguema est-il sincère, ou s’agit-il d’une infiltration bien orchestrée dans l’espoir de récupérer le pouvoir de l’intérieur ?
Des reconversions obligatoires
Plusieurs anciens dignitaires du régime d’Ali Bongo ont su tirer leur épingle du jeu. Camélia Ntoumtoume, par exemple, a été promue ministre d’État, tandis que Jonathan Ignoumba, Jeannot Kalima et Hermann Immongault ont également intégré le gouvernement. Certains, bien que plus discrets, ont reçu des nominations stratégiques, comme Prisca Koho à l’ANINF. D’autres ont choisi de retourner à leur carrière initiale : Guy Patrick Obiang a repris son poste de médecin, tandis que Madeleine Berre et Hugues Madiya Mbandinga exercent aujourd’hui comme consultants internationaux.
Pour leur part, Denise Mekamne et Francis Nkea, tous deux avocats, ont réintégré leurs cabinets respectifs. Rose Christiane Ossouka Raponda, autrefois Première ministre, se fait étonnamment discrète, bien qu’aperçue lors du dernier congrès du PDG. Julien Nkoghe Bekale, quant à lui, semble chercher à capter l’attention du président de la Transition en multipliant les sorties médiatiques.
Un repositionnement politique en vue de l’avenir ?
D’autres anciens barons tentent de se maintenir à flot en évoluant dans la sphère politique. Blaise Louembet a été élu président du PDG, Angélique Ngoma en est la Secrétaire générale, et Biendi Maganga Moussavou reste un cadre influent du parti tout en exerçant comme consultant international. Jean Fidèle Otandault suit la même trajectoire. Yves Fernand Manfoumbi a quant à lui été propulsé vice-président du PDG, tandis que Guy Bertrand Mapangou a fait un pas de côté en créant son propre parti politique.
D’autres encore affichent un activisme ambigu, à l’image d’Ali Akbar Onanga, qui prône soudainement la légalité en se revendiquant du « vrai PDG », au point de créer une branche dissidente. Quant à Flavien Enongoué, il a été nommé Conseiller spécial, chef du département Diplomatie.
Oligui Nguema : soutiens sincères ou infiltration masquée ?
Une question demeure : ces figures de l’ancien régime soutiendront-elles ouvertement une candidature du président Oligui Nguema ? Si oui, ce sera-t-il un ralliement sincère ou une stratégie pour mieux le neutraliser de l’intérieur ?
L’histoire politique gabonaise nous a appris que les alliances sont souvent opportunistes. Si ces anciens cadres d’Ali Bongo soutiennent Oligui Nguema, est-ce pour sa vision politique ou simplement pour préserver leurs intérêts ? Le risque est grand de voir certains tenter de recréer les dynamiques qui ont conduit à la chute du système précédent, en y insufflant les mêmes logiques de compromissions et de malversations.
En fin de compte, la Transition gabonaise est à un tournant décisif. Si le général Oligui Nguema se présente, il devra faire face à ces figures de l’ancien régime, dont le soutien pourrait aussi bien être une force qu’un véritable poison politique.
Ibrahim Mayombo